Aziz Diaby, le chercheur en physique spatiale qui veut promouvoir l’astronomie en Côte d’Ivoire

Bouaké360-Bouaké (Côte d’Ivoire)

Aziz Diaby, le président fraichement élu de l’Association ivoirienne d’Astronomie (AIA) est chercheur en physique spatiale et enseignant de physique-chimie. A travers sa jeune association qui a été portée sur les fonds baptismaux le 13 février 2021 lors d’une Assemblée générale (AG) à l’université Félix Houphouët à Abidjan-Cocody, cet ivoirien passionné de sciences entend faire la promotion de l’astronomie. Dans une interview accordée à Bouake360, il revient sur son parcours, nous parle de sa passion la science avant de nous gratifier d’un cours magistral sur la différence entre astronome et astronaute. Pour lui, la plus grande difficulté à laquelle est confronté le domaine scientifique en Côte d’Ivoire « est que l’état n’investit pas suffisamment dans les recherches ».

Propos recueillis par Eliezer Rodemi

Bouake360 : Présentez-vous 

Je suis Aziz DIABY, chercheur en physique spatiale, spécialiste de l’ionosphère et président de l’Association Ivoirienne d’Astronomie et enseignant de physique-chimie.

Bouake360 : Parlez-nous un peu de votre parcours ?

Aziz Diaby : Après mon bac je suis allé au Sénégal poursuivre mes études. J’ai entrepris des études en physique-chimie, pour me spécialiser en physique pure en 3e année. Après la 3e année, j’ai entamé un master en physique pure et aussi fait un master en physique nucléaire. En 2012 à mon retour au pays, je me suis inscrit à l’université Félix Houphouët-Boigny en Master de physique (spécialité : énergétique et environnement). En 2015, j’ai débuté un doctorat de physique spatiale. Durant ce doctorat, j’ai eu à visiter plusieurs pays (Italie, Inde, USA et Chypre) pour des conférences et atelier autour de la météorologie de l’espace où j’ai pu présenter mes travaux de recherches (recherches qui ont obtenues deux prix). Aujourd’hui, je suis en instance de soutenance de thèse.

Bouake360 : Depuis quand votre association a vu le jour ? Vous avez été élu président pour combien d’année ?

AD : L’association a vu le jour le 13 Février 2021 après une AG. Pendant cette AG, j’ai été élu président pour 6 ans, histoire de bien implanter l’association étant donné que c’est mon idée.

Bouake360 : Pourquoi avoir mis une telle association en place ? Aussi président qu’est-ce que vous allez apporter de nouveau à ce secteur pour faire avancer votre association voire ce secteur ?

AD : Nous voyons depuis un certain nombre d’années que la jeunesse Ivoirienne se désintéresse de tout ce qui est études et surtout sciences. Pour nous qui sommes en sciences, nous avons plusieurs fois entendu des paroles du genre, ça ne paie pas, c’est trop difficile, tu fais PC là c’est pour devenir professeur de PC seulement. Les domaines scientifiques sont délaissés au profit de l’économie, le droit et autres. Cette situation est due à l’inexistence d’infrastructures et de débouchés certains pour les étudiants scientifiques ainsi que la difficulté de compréhension des élèves à l’école, par manque de cours pratique. Vu tout ce qui précède, nous avons décidé de créer cette association pour réconcilier les Ivoiriens avec les sciences en général, d’introduire la météorologie de l’espace et l’astronomie en particulier auprès du grand public.

Bouake360 : Pouvez-vous nous en dire plus sur le rôle d’un astronaute ?

AD : Il ne faut surtout pas confondre astronome et astronaute. Ces termes sont différents. Un astronaute (pour les Américains), également appelé spationaute (pour les Français), cosmonaute (pour les Russes) ou taïkonaute (pour les Chinois), désigne un membre de l’équipage d’un véhicule allant dans l’espace (fusée, navette, etc…). Tandis qu’un astronome est un savant qui s’occupe d’astronomie et, plus particulièrement, physicien spécialiste des calculs et travaux relatifs aux mouvements des astres et à leur structure.

Bouake360 : Quels sont les difficultés rencontrées dans ce milieu ?

AD : La plus grande difficulté est que l’état n’investit pas suffisamment dans les recherches scientifiques. Nous avons besoin de financement pour les équipements.

Bouake360 : Selon vous quels seront les efforts et but de l’association ?

AD : Les efforts de l’association seront destinés à la propagation et à la vulgarisation des sciences de l’Univers, à faciliter les voies et moyens à tous ceux qui désirent entreprendre des observations et des recherches en astronomie dans un esprit de tolérance et d’objectivité. Nous aurons ainsi des tournées dans les écoles pour parler d’astronomie et des activités d’observations (ouvertes au public) de la Lune et des planètes. Il y aura aussi des sessions de formation et des conférences ouvertes à tous ceux qui sont intéressés. L’objectif final est la création d’un observatoire astronomique en Côte d’Ivoire.

Bouake360 : Parlez-nous un peu de la planète Mars ?

AD : Mars… Il y a tellement à dire sur cette planète qu’on ne peut pas tout dire en une interview. Mais ce qu’il faut savoir sur Mars est que si l’homme veut s’installer autre part que sur Terre, dans notre système solaire, ce ne sera possible que sur Mars. C’est le seul endroit pour y installer une colonie à moindres frais. Les températures ne sont pas trop mauvaises, le jour et la nuit s’alternent tous les 24 heures et 40 minutes alors que sur la Lune qui est plus proche, c’est 14 jours et autant de nuits. Sur Mars, il y a de l’eau, de la lumière, du gaz carbonique, des roches, du sable, de l’argile, du plâtre. Toutes les matières premières pour consolider une base et même entrevoir une colonie à long terme. On est au bord de la science-fiction, mais aucune autre planète n’offre autant de garanties.

Bouake360 : Quel est le message à laisser à l’endroit de ces passionnés de sciences spéciales en général et en particulier à l’État de Côte d’Ivoire ?

AD : Je veux dire à ces passionnés de croire en leurs rêves et surtout, de ne laisser personne leur faire croire qu’ils n’y arriveront pas. Il y a beaucoup d’opportunités en sciences et notre pays, pour émerger n’a pas d’autres choix que d’investir dans les recherches scientifiques.

Bouake360 : Nous sommes au terme de notre entretien votre mot de fin.

AD : Je voudrais profiter de cette opportunité pour inviter le public (élèves, étudiants, tous les passionnés en général) à adhérer massivement à l’association. A défaut de financement, les adhésions pourront déjà constituer un fond pour l’achat d’équipements pour mener à bien nos activités dont le but est de, redonner l’amour des sciences aux Ivoiriens pour ainsi contribuer au développement de notre pays. Merci.

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Dr Yassine Fofana, un demi-siècle de combat pour normaliser la médecine traditionnelle africaine (Portrait)

Bouaké (Côte d’Ivoire)-Bouaké360

Le célèbre chercheur-pharmacien ivoirien Dr Mamadou Yassine Fofana, titulaire d’une vingtaine de brevets de formules scientifiques de médicaments à base de plantes médicinales a fêté ses 76 ans de vie en 2017 dont 41 années passées entre ses éprouvettes et les bois sacrés du continent africain pour documenter et normaliser le fabuleux travail abattu depuis des millénaires par de nombreux détenteurs anonymes des secrets de la médecine traditionnelle africaine. Retour sur le portrait de ce panafricaniste émérite, publié pour la première fois en 2017 sur le site du confrère apanews.net.

Après des études à la faculté mixte de médecine et de pharmacie de Rouen (France) où il obtient un diplôme de pharmacien-chercheur, le jeune Mamadou Yassine Fofana rentre en Côte d’Ivoire en 1976. Il est alors affecté à Korhogo dans l’extrême Nord du pays où il occupe pendant 3 ans le poste de pharmacien chef du Centre hospitalier rural (CHR) de la localité.

En 1984, il quitte la fonction publique et installe sa première officine de pharmacie à Bouaflé (Centre-Ouest) avant d’ouvrir la même année la pharmacie de la grande mosquée de Bouaké, dans le Centre-Nord ivoirien.

C’est donc à Bouaké que ce passionné de nature et de culture africaine va décider de s’installer pour mettre son savoir-faire en pratique, en vue de donner une base scientifique à la médecine traditionnelle, une science longtemps décriée par ces détracteurs de charlatanisme. Il crée donc à Bouaké, en 1990, les laboratoires Galefony, un centre de recherche et de production de médicaments à base de plantes médicinales, en partenariat avec le département de la médecine traditionnelle (DMP/INRSP) de Bamako (Mali).

Pour ce farouche africaniste, ‘’l’Africain doit avoir confiance à l’Africain parce que notre savoir-faire dans le passé a été très important et grâce aux recettes de nos ancêtres, nous avons pu survivre’’ avant l’avènement de la colonisation ‘’à travers l’exploitation des plantes que ce soit à des fins thérapeutiques ou nutritionnelles’’.

‘’L’Afrique est riche’’, pourquoi diantre, ‘’n’arrivons nous pas à comprendre cela’’ aime-t-il répéter de sa voix un peu enrouillée par le poids de l’âge.

‘’Nous avons hérité des recettes traditionnelles qui ont permis de soigner nos ancêtres depuis des millénaires. En exploitant une telle richesse, on aura la possibilité de soigner la population à moindre coût’’, fait-il remarquer avant de s’interroger ‘’quand l’invisible sera-t-il visible ?’’.

Comme pour dire que malgré tout le travail abattu dans l’ombre des laboratoires ‘’on est en train de dévaster nos forêts qui renferment les plantes médicinales (…) Nos Etats sont encore réticents pour nous accompagner dans la recherche et dans la promotion de nos produits qui sont pourtant labellisés (…) Les visas d’exploitation des produits coûtent chers et il faut les renouveler chaque 5 ans’’.

Malgré toutes ces difficultés, de nombreux témoignages attestent de l’efficacité des produits fabriqués par les soins de l’érudit ivoirien.

‘’Je suis un exemple de ceux que le Dr Fofana Yassine a sauvés’’, a, publiquement, témoigné Me Yaya Koné, lors d’une conférence animée le samedi 25 février, à Bouaké, par l’homme de science sous le thème : « Apport de la médecine traditionnelle dans les soins de santé : prise en charge des pathologies courantes ».

‘’Je souffre de la goutte et en même temps j’ai été victime d’une insuffisance veineuse du membre inférieur gauche et j’ai manqué de me faire amputé à Bouaké’’ a poursuivi Me Koné,ajoutant que ‘’je me suis rendu en Tunisie où j’ai suivi une intervention chirurgicale, je suis revenu et la maladie a repris et le Dr Yassine Fofana ici présent est celui là qui a permis que je porte à nouveau des chaussures fermées’’.

D’ailleurs, c’est au cours de cette conférence que le pharmacien-chercheur a proposé comme alternative à la mévente du cacao (un sujet qui fait beaucoup de bruits en ce moment en Côte d’Ivoire)de transformer localement ce produit afin d’en faire un médicament.

‘’Nous avons déjà commencé à utiliser le beurre de cacao pour faire des suppositoires, cela existe déjà en Europe et nous allons le faire ici en Côte d’Ivoire, alors qu’on parle de mévente du cacao’’, a souligné Dr Fofana.

Pour lui, ‘’si le gouvernement nous encourage, on pourra utiliser le beurre de cacao pour fabriquer des médicaments’’. Ce qui d’ailleurs va occasionner la création de ‘’beaucoup d’emplois’’ autant pour les planteurs que pour les employés de la chaîne industrielle qui sera créée à cet effet.

Selon le scientifique, le cacao contient une substance ‘’non excitante qui tranquillise’’. Ce produit s’il est transformé en médicament pourrait donc servir comme un puissant tranquillisant. Également, a-t-il fait savoir, ‘’la noix de cajou peut être utilisée comme bactéricide(pour tuer les bactéries), comme antimicrobien et nous pouvons transformer ses feuilles pour faire des antibiotiques et des antimycosiques (pour lutter contre les mycoses et la teigne).

C’est pourquoi il invite les pouvoirs publics à investir dans cette direction ‘’au lieu d’attendre des miettes’’ de la vente de ces produits agricoles sur le marché international.

‘’L’Etat ivoirien vient à peine de donner l’autorisation pour que nous vendons nos produits dans les pharmacies. Je fais partie de l’équipe qui encourage cela avec l’appui du ministre actuel de la recherche scientifique et de l’enseignement supérieur (ndlr : actuel ministre de la Femme, de la Famille et de l’Enfant, Pr Ramata Ly-Bakayoko’’, relève-t-il.

Sur une vingtaine de produits à base de plantes médicinales dont les brevets portent son nom, seulement deux sont en ce moment ;vendus en pharmacie en Côte d’Ivoire et au Mali où il avait élu domicile parce que la législation sur la médecine dans ce pays se prêtait à sa volonté de faire reconnaître par le gotha scientifique mondial les vertus des plantes médicinales de sources africaines. Il est de retour en Côte d’Ivoire, précisément à Bouaké où il partage son temps entre son cabinet pharmaceutique au quartier Sokoura et son laboratoire du quartier Kennedy.